Pourquoi écrit-on « Moillesulaz » à Genève et « Moëllesulaz » en France voisine ?

Voici ce que nous pouvons lire dans l’article « Une étymologie de « Moëllesullaz» » http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4872882/f269.item.r=Mo%C3%ABllesullaz.zoom par Pascalein et C. Marteaux et paru en 1898 dans la « Revue Savoisienne » : 
« Moëllesulaz est un ancien village savoyen dont la moitié occidentale a été livrée, en 1816, à la république de Genève. Il est traversé par un Foron, petit affluent de la rive droite de l’Arve, qui, dans tout son cours, sert de ligne frontière. La portion suisse a été rattachée à la commune de Thônex. La portion française appartient à la commune de Gaillard dont elle constitue la plus importante section. […] 

Quel est le sens de ce vocable composé de deux termes, « moëlle », « moille », « moillié » et « sulaz » ou « soulaz » ? […] 
« Moille » représenterait la troisième personne de l’indicatif présent du verbe « moiller » ou « mouiller » et « solar » ou « soular » la forme patoise du mot « soulier ». Un « moille-solar » aurait été un endroit plus ou moins humide, ou même marécageux, que l’on ne traversait, en tout cas, qu’en mouillant sa chaussure. » 



Le toponyme correspond donc a un lieu humide (les « mouilles » ou « moilles » désignent des prairies humides en Savoie et Haute-Savoie), peut-être même un gué sur le Foron, comme le suggère Jean-Frédéric Rouiller dans son article « Toponymie genevoise » http://www.persee.fr/doc/globe_0398-3412_1961_num_101_1_3476 paru en 1961 dans la revue genevoise de géographie « Le Globe ».  La plupart des noms de lieux sont anciens. Ils existaient avant la normalisation de l’orthographe française, voire avant la généralisation de l’usage du français moderne. C’est la raison pour laquelle ils dérivent souvent de patois et leurs graphies varient en fonction des zones géographiques et des prononciations anciennes, ou simplement aussi au fil du temps. 
Vous trouverez dans le glossaire des « Noms de lieux de Suisse romande, Savoie et environs » http://henrysuter.ch/glossaires/topoM2.html#moellesulaz établi par Henry Suter, une liste intéressante de variantes. On apprend que le lieu qui vous intéresse était appelé « Molliez solaz » au XIIIe siècle, « Molhisola » au XIVe siècle, « Moillesole » en 1409, « Moilleseule » sur la Carte de Cassini. D’autres lieux-dits portent de noms similaires, avec des graphies variables. En passant, il faut noter que le suffixe -az est simplement une manière d’indiquer que l’accent est porté sur l’avant dernière syllabe. Il se prononce à peu près comme un -e muet. 
Moillesulaz et Moëllesulaz sont bien à l’origine un seul et même village. C’est en 1816, après le traité de Turin, que le Foron devient frontière. C’est la séparation géographique qui est à l’origine de la distinction orthographique. 
Le site « Genève à la carte » http://www.ge200.ch/carto/ permet de consulter de nombreuses cartes historiques, où l’on trouve les différentes formes prises par le nom depuis 1816. 
Plans de 1816 en Annexe au traité de Turin http://www.ge200.ch/carto/plans-de-1816-annexes-du-traite-de-turin-de-1816-6 : Moilleçule Carte française de l’Etat-Major (1820-1866) http://www.ge200.ch/carto/carte-de-letat-major-1820-1866 : Moillesula Carte Dufour (1842) http://www.ge200.ch/carto/carte-dufour-1842 : Moillesulaz – Du côté suisse, le nom semble ne plus évoluer, alors qu’il faut encore un peu de temps pour que la forme actuellement utilisée pour la partie française se fixe. Carte IGN 1:50000e (1935-1949) http://www.ge200.ch/carto/carte-ign-150000-1935-1949 : Moellessule Carte IGN 1:50000e (1969-1972) http://www.ge200.ch/carto/carte-ign-150000-1969-1972 : Mœllesulaz Carte IGN 1:50000e (1999-2006) http://www.ge200.ch/carto/carte-ign-150000-1999-2006 : Moëllesulaz 

Source : service Interroge